Après avoir levé le voile sur des problématiques de management inadapté et de harcèlement au sein de la société dirigée par Yves Guillemot, qui ont entraîné, après investigations internes, des licenciements et départs, dont celui du numéro 2 Serge Hascoet, Libération s'est intéressé aux dessous d'Ubisoft Montpellier.
La nouvelle de sa retraite, après trente ans de carrière, a surpris, pour ne pas dire choqué. Michel Ancel, 48 ans, était l'un des visages les plus connus et les plus riants d'Ubisoft, voire du Jeu Vidéo. Mais dans une enquête signée Erwan Cario et Marius Chapuis publiée chez Libération, le portrait qui est dressé du père de Rayman, des Lapins Crétins et de Beyond Good & Evil ne prête pas à sourire.
L'article se penche sur la gestation, toujours en cours, de Beyond Good & Evil 2, officialisé lors des Ubidays 2008, avant de réapparaître sous une autre forme lors de l'E3 2017 et le rapport d'Ancel à ses équipes depuis le début du développement, il y a plus de sept ans.
Le natif de Monaco y est accusé par une quinzaine d'employés du studio d'avoir essoré ses équipes avec ses exigences et ambitions déraisonnables, ses changements d'humeur et surtout de vision concernant le projet, qui ont failli coûter son annulation en 2019. Le comportement et la gestion confuse - à temps partiel - d'Ancel aurait entraîné des burn-outs et dépressions à répétition. Il aura même fallu revoir le management et faire venir un autre game director à Montpellier de manière à ce que le Chevalier des Arts et des Lettres interagisse le moins possible avec les développeurs.
Un départ précipité ? Ancel répond
On apprend également que Michel Ancel était visé par une enquête interne lancée en août après plusieurs plaintes, dans la suite de celles qui ont découlé des accusations de harcèlement au sein du groupe. Selon le journal, l'officialisation de son départ se serait faite quelques heures à peine après qu'il a été entendu par une commission sur sa gestion humaine du développement.
Il avait pu répondre longuement à nos confrères à travers une interview que nous vous invitons également à lire. Interrogé sur les sujets qui fâchent, il avance des conditions particulières liées à l'ampleur et l'étalement de la production, reconnaît des souffrances, confesse qu'il aurait aimé savoir si les burn-outs étaient dus à une maladresse de sa part ou une sollicitation trop importante... Mais ne manque pas de clamer que beaucoup de personnes n'étaient pas préparées à "un projet d'une dimension jamais atteinte dans le jeu vidéo". Puis avoue ne pas être surpris que certaines aient demandé son départ, pour ensuite affirmer :
Si j'étais resté, il n'y aurait pas eu de BGE2.
Sur l'enquête dont il a fait l'objet, et le timing de son retrait, qui pourrait exprimer une forme de protection, il confie :
Yves m'a appelé début août pour me prévenir. C'était mieux qu'un mail. Je savais que ça allait arriver, je lui ai répondu : «OK, je vais dire tout ce qui me semble possible de dire, si je ne peux plus bosser parce que j'ai fait ci ou ça et que c'est répréhensible, in fine, la boîte en sortira meilleure.» Et aujourd'hui, à peine rentré de vacances, j'ai répondu aux questions pendant deux heures.
Je n'arrive pas trop à voir le lien. Je ne quitte pas uniquement BGE2, je quitte aussi Wild Sheep. C'est l'aboutissement d'un long processus, quelque chose de vérifiable. C'est pas comme si, tout à coup, je quittais un temps plein sur BGE2 pour partir faire des burgers sur la Croisette.
Sur Instagram, le créatif a ensuite réagi, évoquant une "fake news", des déclarations de personnes haineuses et jalouses, et un timing un peu trop en accord avec les affaires d'été d'Ubisoft.
Désormais investi, à 100% cette fois, dans un refuge animalier, le concepteur avait rassuré sur BGE2 et WiLD, et le fait que les équipes étaient autonomes et avançaient "super bien". Nous pensons bien évidemment à elles et leur souhaitons le meilleur pour l'avenir, dans un climat serein et bienveillant.